Edito - OnlyFans, la confiance rompue
Le comportement de la plateforme anglaise est à l'image de la cuisine d'outre-Manche : infecte.
Après avoir annoncé le 19 août vouloir bannir tout contenu “sexuellement explicite” - comprendre la pornographie, appelons une chatte une chatte, OnlyFans a finalement fait machine arrière le 25 août en annonçant la suspension de sa décision. Mais pas son annulation. Nuance.
Contacté, leur service presse confirme sans donner plus de détails : “les modifications proposées pour le 1er octobre 2021 ne sont plus nécessaires en raison des garanties avancées par les partenaires bancaires selon lesquelles OnlyFans peut héberger tous types de créateurs”.
Dans une interview accordée au Financial Times, le big boss (et fondateur) de la boîte Tim Stokely révèle les raisons de tout ce drama. Et l’identité des grands méchants : Bank of New-York Mellon (US), Metro Bank (GB) et JPMorgan Chase (US).
Trois grosses banques qui auraient rejeté chaque transaction impliquant OnlyFans, par peur de salir leur réputation. “Nous payons plus d’un million de créateurs plus de 300 millions de dollars chaque mois, et pour s’assurer que ces fonds parviennent aux créateurs, il faut utiliser le secteur bancaire”, a déclaré Tim Stokely. Avant d’enchainer : “JPMorgan Chase est particulièrement agressif dans la clôture des comptes des travailleuses du sexe ou toute entreprise qui soutient les travailleuses du sexe.“
OF devait donc faire un choix : le cul ou le soutient des banques. Quitte à se montrer ingrat avec les TDS, sans qui OnlyFans serait aussi passionnant qu’une tribune d’Eric Zemmour. Les spécialistes verront dans cet épisode l’énième preuve de l’influence du milieu conservateur US, ouvertement anti-porno, sur le secteur bancaire.
Mais ça va, d’après le tweet du 25/08, tout est arrangé. Et pour cause : OF s’est dégoté de nouveaux partenaires bancaires plus ouverts d’esprit, sans lâcher leurs noms pour autant.
“Kuwa ? Mais moi j’croyais que toute cette histoire, c’était à cause des nouvelles règles contraignantes que MasterCard souhaitait imposer aux sites vendeurs de contenus pour adultes !” Bah non ma pauv’ Lucette. Le chef d’OnlyFans, il dit que la plateforme est déjà en conformité avec ça. Si si, parole de scout, TMTC.
Officieusement, la mobilisation des TDS - et de leurs allié(e)s - a aidé OF à revoir sa copie. La menace d’un naufrage à la Tumblr aussi. Ou serait-ce dû à l’immense perte financière que représenterait une fuite des TDS… ? 20% de commission sur les revenus des sex-workers, ça en fait du pognon. Pas sûr que Tim soit prêt à s’assoir dessus.
Dans l’esprit des TDS présent(e)s sur OnlyFans, c'est l'incertitude : combien de temps avant la prochaine saute d’humeur de la plateforme ? Qu’adviendra-t-il du contenu acheté par les clients lorsque le porno sera banni d’OF (car oui, ça arrivera) ? Pourront-ils toujours le consulter ou seront-ils remboursés ? Comment faire confiance à un site qui ne prend pas la peine de répondre aux questions des TDS, préférant se réfugier derrière les communiqués de presse et la langue de bois (spoiler : vous ne pouvez pas) ?
Ces questions, nous les avons posé à OnlyFans. Pas de réponses. Les TDS rêvent de stabilité, ce n’est pas sur cette plateforme qu'elles / ils la trouveront.
La concurrence, elle, n’a pas perdu de temps. Dès les première heures, elle communiquait pour attirer les créatrices/créateurs de contenu pour adultes en quête d’un nouvel espace de travail virtuel sûr. PocketStars, un site conçu et pour les TDS fait partie des favoris. A suivre.
Mais la menace est plus grande.
Elle dépasse largement la petite guerre de tranchées OnlyFans VS MasterCard / les banques. Cette “““polémique””” n’est que l’arbre qui cache la forêt. Comme le précise le journaliste américain Gustavo Turner, c’est le lobby religieux et anti-porno qu’il faut craindre. Ceux qui manœuvrent en coulisses depuis des décennies, influençant médias, banques et politiques de tous bords. Ce sont eux les vrais ennemis, Exodus Cry et autre NCOSE en tête. Mais nous aurons l’occasion d’y revenir.
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