Cagnottes en ligne : des sessions d’information pour éviter les fermetures abusives
Par crainte d’être accusés de proxénétisme, les sites de crowfunding ferment d'emblée les cagnottes d’aide aux TDS. Le député Raphaël Gérard envisage des actions pédagogiques à leur encontre.
Mieux informer les plateformes de crowfunding (Le Pot Commun, Leetchi, etc.) pour éviter les fermetures abusives de cagnottes ouvertes par les associations de santé communautaires.
C’est le projet que souhaite porter le député LREM Raphaël Gérard auprès de Cédric O, secrétaire d’Etat chargé du Numérique. En toile de fond, la mésaventure connue par l’association Grisélidis, lors du premier confinement (voir plus bas).
« Le Code Pénal et le Code de la Santé sont clairs : les associations de santé communautaires ne tombent pas sous le coup du proxénétisme passif ou de l’aide à la prostitution, puisqu’elles ont un objet social bien délimité, celui du l’accompagnement médico-social des TDS », détaille l’élu au téléphone.
Car c’est bien là le nœud du problème. Par peur de poursuites au pénal, les plateformes ont tendance à réagir de manière disproportionnée, appliquant de manière excessive leur règlement pour justifier la fermeture des cagnottes. « Rétroactivement, elles comprennent qu’elles ont fait une bêtise. Mais elles ne l’assument pas. C’est une histoire de réputation. C’est très difficile d’obtenir une restitution des fonds, ou ne serait-ce qu’une explication », enchaîne le député. Dans le cas d’une cagnotte ouverte par un particulier, toujours dans l’objectif d’aider les TDS, la situation est plus compliquée car ce dernier ne dispose d’aucun statut.
Afin de connaître la position de l’administration sur le problème et sa proposition, Raphaël Gérard passera par la procédure dite de la question écrite. « La question, et la réponse, seront publiées au Journal Officiel. C’est une procédure plus longue et formelle qu’un simple échange de courriers entre parlementaires. »
« Une manière polie de dire qu’ils font la chasse aux putes »
Pour comprendre le projet de Raphaël Gérard, il faut remonter au premier confinement, début 2020. Suite à l’épidémie de Covid-19, une partie des TDS est confrontée à une baisse drastique de revenus, et à une extrême précarité. L’association Grisélidis décide d’ouvrir une cagnotte sur Le Pot Solidaire, succursale du Pot Commun, pour leur venir en aide. Très vite, 16 000€ sont récoltés.
Face à l’urgence de la situation, la structure pioche dans ses propres fonds, en espérant récupérer les dons par la suite. Mais rien ne se passe comme prévu. « Au mois de juin, j’ai demandé le versement de la somme sur le profil de l’asso’. Ils m’ont indiqué que le virement était validé », détaille June Charlot, médiateur santé chez Grisélidis. Mais l’argent n’arrivera jamais.
Pire : la plateforme commence a remboursé les donateurs.
« Certains nous ont appelé, ils ne comprenaient pas pourquoi. Nous n’avons reçu aucun message pour nous prévenir ! Mais le site n’a pas remboursé les donateurs dont la carte bancaire était expirée, il restait donc 2 000€. Le Pot Solidaire a proposé de nous les reverser, sans aucun protocole ni rien. »
Après plusieurs tentatives, Grisélidis reçoit enfin un début d’explication alambiquée : la superposition d’une injonction administrative et d’un surplus d’activité a entrainé une application irraisonnée de ses CGU (conditions générales d’utilisation). « Une manière polie de dire qu’ils font la chasse aux putes et qu’ils se sont plantés nous concernant. »
Reste que le site, lui, a tout de même prélevé sa commission de 4% sur chaque don effectué sans pour autant remplir sa mission. Se lancer dans une bataille juridique ? Pas d’actualité pour June : « C’est très chronophage, et nous sommes déjà très pris par nos actions. »
Note : nous avons tenté de joindre Le Pot Commun dans le cadre de cet article. Mis à part la promesse que notre demande a bien été transmise, nous n’avons reçu aucun retour.
Jonathan Konitz